La clause de non-concurrence dans un pacte d’associés

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Cet article a été rédigé par Maître Luliana Babei.

La clause de non-concurrence est un outil juridique fondamental pour protéger les intérêts d’une société contre des comportements concurrentiels de la part de ses associés. Si la liberté de commerce et d’entreprise reste un principe clé, des restrictions peuvent s’imposer pour préserver la clientèle, le savoir-faire ou les avantages stratégiques d’une entreprise. La rédaction d’une clause de non-concurrence exige une expertise rigoureuse. L’intervention d’un avocat spécialisé en droit commercial et de la concurrence ou en droit du travail ne se limite pas à des conseils techniques, elle garantit une anticipation minutieuse des enjeux juridiques et commerciaux, et une sécurité optimale des intérêts de la société face à toute concurrence potentielle.

La clause de non-concurrence dans un pacte d’associés

À RETENIR : Quelles sont les conditions pour garantir la validité d’une clause de non-concurrence ?

Pour être valide, une clause de non-concurrence doit :

  • Protéger un intérêt légitime de la société ;
  • Être limitée dans le temps et l’espace ;
  • Avoir un objet précis en termes d’activités concurrentes interdites.

Lorsqu’elle s’applique à un salarié associé, elle doit également inclure une contrepartie financière. Toute clause excessive ou mal définie risque d’être annulée.

Cet article explore les contours juridiques de cette clause, ses conditions de validité et les sanctions applicables en cas de violation, tout en tenant compte des dernières évolutions jurisprudentielles.

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La loi n’interdit pas aux associés de concurrencer la société

En principe, rien interdit aux associés de concurrencer la société à laquelle ils appartiennent.

La loi prévoit une obligation de non-concurrence uniquement pour les associés de certaines sociétés spéciales comme les SEL ou les SCP.

Quant aux autres sociétés, la jurisprudence a rappelé plusieurs fois la règle selon laquelle par exemple les associés des SARL ou SAS ont une obligation de loyauté qui est liée à la qualité de dirigeant et non pas à celle d’associé et qu’elle n’impose donc pas à l’actionnaire de ne pas concurrencer la société.

Les limites à la liberté de concurrencer

Malgré cette liberté, des restrictions s’imposent :

  • Information de la société : Un associé souhaitant exercer une activité concurrente devrait informer la société pour éviter tout litige.
  • Interdiction des pratiques déloyales : Un associé ne peut pas capter la clientèle de la société par des moyens déloyaux, tels que l’utilisation de fichiers clients ou d’informations confidentielles pour son propre bénéfice.
  • Rôle de dirigeant : Lorsqu’un associé occupe également des fonctions de dirigeant, il est tenu à une obligation de non-concurrence de plein droit.
  • Apport en industrie : Selon l’article 1843-3 du Code civil, un apporteur en industrie doit rendre compte à la société de tous les gains qu’il a réalisés grâce à son apport.

 Comment rédiger une clause de non concurrence

Une clause de non-concurrence peut être insérée soit dans les statuts, soit dans une convention extrastatutaire comme le pacte d’associés.

Afin d’être considérée comme étant valide juridiquement, une telle clause doit répondre à un certain nombre de critères qui ont été générés par la jurisprudence.

Cette clause doit avoir un motif légitime, un objet précis et être limitée dans le temps ou dans l’espace.

D’autres critères viennent se rajouter si un associé est lié à la société par un contrat de travail.

La Cour de cassation a confirmé ainsi que la validité de la clause de non-concurrence insérée dans un pacte d’actionnaires à l’égard d’un associé salarié est désormais subordonnée à la réunion des quatre conditions suivantes :

  • elle doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise ;
  • elle doit être limitée dans le temps et dans l’espace ;
  • elle doit tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié ;
  • elle doit comporter l’obligation pour l’entreprise de verser à ce dernier une contrepartie financière.
À noter :
La contrepartie financière ne s’impose pas lorsque l’associé qui doit respecter cette clause n’a pas signé un contrat de travail, mais une telle contrepartie peut quand même être prévue contractuellement.

Notre pratique démontre souvent qu’il est difficile d’obtenir l’unanimité des associés sur le contenu de la clause et que des ajustements sont apportés pour préciser le périmètre de l’engagement.

Les sanctions en cas de violation de l’engagement de non-concurrence 

En cas de non-respect d’une clause de non-concurrence, les sanctions applicables sont régies par l’article 1217 du Code civil, qui prévoit plusieurs remèdes :

  1. Refus ou suspension de l’exécution des obligations de la société envers l’associé fautif.
  2. Exécution forcée en nature (exemple : arrêter une activité concurrente).
  3. Réduction du prix de rachat des parts de l’associé fautif.
  4. Résolution du pacte d’associés ou du contrat concerné.
  5. Dommages et intérêts pour compenser le préjudice subi par la société.
À savoir :
  • Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.
  • Dans le cadre du pacte d’associés, le non respect d’une clause de non-concurrence fait souvent l’objet de sanctions spécifiques sur lesquelles s’entend la totalité des associés.

Comment un avocat peut-il contribuer à la mise en œuvre et à l’application d’une clause de non-concurrence dans un pacte d’associés ?

Un avocat peut intervenir de plusieurs façons dans le cadre de la clause de non-concurrence dans un pacte d’associés :

  • Rédaction personnalisée : L’avocat analyse les spécificités de la société, son activité, ses enjeux concurrentiels, et rédige une clause adaptée. Il veille à ce qu’elle soit conforme aux exigences légales (motif légitime, limites temporelles et géographiques, etc.) et qu’elle protège efficacement les intérêts de la société.
  • Conseil stratégique : En cas de désaccord entre associés, l’avocat peut aider à trouver un compromis sur les termes de la clause, notamment sur son périmètre ou la contrepartie financière éventuelle.
  • Gestion des litiges : Lorsqu’un associé viole la clause, l’avocat accompagne la société dans la mise en œuvre des sanctions prévues ou dans l’engagement de procédures judiciaires pour obtenir réparation.
  • Audit et mise à jour : L’avocat peut également auditer les clauses existantes dans les pactes d’associés pour s’assurer qu’elles restent valides et adaptées aux évolutions légales ou jurisprudentielles.

La clause de non-concurrence dans un pacte d’associés est bien plus qu’une formalité contractuelle : elle incarne une stratégie juridique clé pour protéger la société contre des concurrents potentiels, y compris parmi ses propres associés. Sa mise en œuvre demande une rigueur rédactionnelle et une analyse contextuelle approfondie afin d’assurer son efficacité sans dépasser les limites légales. L’expertise d’un avocat spécialisé en droit du travail est indispensable, non seulement pour garantir la validité de la clause, mais aussi pour anticiper et résoudre tout conflit susceptible de surgir.

POINTS CLÉS À RETENIR

  • La clause de non-concurrence est essentielle pour protéger les intérêts stratégiques d’une société contre la concurrence interne.
  • Les associés bénéficient en principe d’une liberté de concurrencer, sauf exceptions prévues par la loi ou la jurisprudence.
  • La validité de la clause repose sur des critères stricts : légitimité, précision, et limites temporelles et géographiques.
  • Les sanctions pour violation d’une clause de non-concurrence incluent des dommages-intérêts ou la résiliation du pacte d’associés.
  • Faire appel à un avocat spécialisé garantit une rédaction solide et adaptée, évitant les contestations juridiques.