Comprendre l’abandon de poste : causes, conséquences et solutions
L’abandon de poste, que ce soit en CDI ou en CDD, peut entraîner de lourdes sanctions disciplinaires. Une absence prolongée ou répétée sans justification est souvent considérée comme un abandon de poste, bien que toutes les absences non planifiées ne constituent pas nécessairement une faute grave. Toutefois, si le motif de l’absence est légitime, comme des raisons de santé, l’employeur ne peut pas sanctionner le salarié. Quels sont les risques en cas d’abandon de poste ? Faites appel à un avocat en droit du travail pour rompre votre contrat de travail rapidement, mais dans les règles.
Voici une infographie qui condense les essentiels en matière d’abandon de poste :
À RETENIR : Que se passe-t-il en cas d’abandon de poste ?
En cas d’abandon de poste, l’employeur envoie une lettre de mise en demeure au salarié pour justifier son absence et reprendre le travail. Si le salarié ne répond pas ou ne revient pas dans les 15 jours suivant la réception de la mise en demeure, l’abandon de poste est considéré comme une démission présumée, privant ainsi le salarié de l’allocation chômage.
Pour en connaître davantage sur les avantages et les inconvénients de l’abandon de poste. Lisez ce qui suit !
Qu’est-ce qui est considéré comme un abandon de poste ?
L’abandon de poste se manifeste par :
- L’absence du salarié pendant les heures de travail, de manière ponctuelle ou étalée sur plusieurs jours, sans autorisation de l’employeur ni justification par un motif légitime ;
- Le départ anticipé ou non justifié du salarié de son poste de travail.
Cette infographie résume l’essentiel à savoir sur la manifestation de l’abandon de poste :
Abandon de poste et démission : que dit la nouvelle loi « Marché du travail »
Adoptée le mardi 15 novembre 2022 par l’Assemblée nationale par 242 voix contre 91, la loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi reconnaît la présomption de démission en cas d’abandon de poste. Celle-ci est toutefois conditionnée par l’envoi d’une mise en demeure préalable par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge de l’employeur. Cette mise en demeure a pour but de demander au salarié de justifier son absence et de reprendre son emploi dans les 15 jours à compter de la réception de la mise en demeure.
Article 4 de la loi n°2022-1598 du 21 décembre 2022 :
Est présumé démissionnaire tout salarié qui a abandonné de son plein gré son poste et ne reprend pas son travail, malgré la mise en demeure envoyée par son employeur, à compter de l’expiration du délai fixé par ce dernier.
Par voie de conséquence, le salarié ne pourra pas prétendre à une indemnisation par France Travail dans la mesure où la rupture du contrat de travail sera encadrée par les dispositions relatives à la démission. Pour rappel, sauf cas exceptionnel, la démission ne permet pas de bénéficier d’une allocation chômage contrairement au licenciement ou au départ à la retraite.
Bien sûr, le salarié a la possibilité de contester la rupture de son contrat de travail et de renverser la présomption de démission en saisissant directement le bureau de jugement du conseil de prud’hommes.
Le juge dispose alors d’un délai d’un mois à compter de la date de la saisine pour statuer au fond. Il se prononcera sur les éléments de la liste suivante :
- La nature de la rupture du contrat de travail ;
- Les conséquences de cette dernière.
Quels sont les risques d’un abandon de poste ?
L’abandon de poste est une alternative mettant rapidement fin à un contrat de travail, qu’il soit à durée déterminée ou indéterminée. Cependant, le salarié s’expose à plusieurs risques. En voici une liste de quelques exemples :
Abandon de poste et chômage
- Le salarié se retrouve sans salaire, sans indemnités et sans allocation chômage
Le salarié ayant effectué un abandon de poste est coupé de toutes ses sources de revenus. Si l’employeur lance une procédure de licenciement pour faute grave et procède à une mise à pied conservatoire, le salarié ne perçoit rien. Pendant les deux mois de procédure au cours desquels l’employeur envoie une lettre de convocation à un entretien préalable, voici la liste des situations :
– Sa rémunération est suspendue puisqu’elle constitue la contrepartie d’un travail effectué ;
– Perte des droits au chômage.
- Le salarié peut être embauché pour un nouvel emploi
Comme le contrat de travail est résilié, le salarié est disponible pour un nouveau poste.
Voici une infographie qui explique les risques en cas d’abandon de poste :
- L’employeur réclame des dommages-intérêts
S’il arrive à prouver que la rupture brusque du contrat de travail a été motivée par une intention de nuire, l’employeur peut demander une indemnité auprès du Conseil des prud’hommes.
Si le contrat de travail prévoit une clause de non-concurrence, l’employeur peut l’utiliser pour apporter un facteur aggravant dans le cas où le salarié a abandonné son poste pour rejoindre une entreprise concurrente.
- Le salarié entache sa réputation professionnelle
L’absence de certificat de travail peut dévaloriser l’expérience et le CV du salarié. De plus, si le salarié ne donne pas son accord pour la récolte d’informations auprès de l’entreprise où il a commis un abandon de poste, ses prochains employeurs risquent d’avoir des doutes et de ne pas lui faire confiance.
Cette règle est appliquée dans les cas de la liste suivante :
- Le nouvel employeur est intervenu dans la rupture du contrat de travail ;
- Il savait à l’embauche que le salarié était encore lié par un contrat de travail ;
- Il a poursuivi le contrat de travail en sachant que le salarié est encore engagé dans une autre entreprise.
Comment faire pour que l’employeur accepte une rupture conventionnelle ?
La rupture conventionnelle est une rupture du contrat de travail lors de laquelle l’employé et l’employeur se conviennent sur un commun accord. Cette technique permet à l’employé de quitter plus rapidement son travail, dans les délais légaux, et sans intervention du Conseil de prud’hommes.
Pour faire accepter la rupture conventionnelle, voici une liste de quelques conseils :
- Trouvez le bon interlocuteur, notamment celui qui est apte à convaincre les décisionnaires de l’entreprise (votre manager, votre N+2 ou encore le responsable RU).
- Réunissez les arguments de négociation (mettre en avant un projet personnel, l’absence d’une perspective d’évolution en interne, le désir d’une reconversion professionnelle ou encore la souffrance au travail).
- Choisissez le bon moment pour effectuer votre demande. Évitez de lancer le sujet lors des réunions en groupe ou encore lors d’une conversation dans les couloirs. Privilégiez les entretiens privés. Commencez par les discussions informelles.
- Lors de l’entretien, insistez sur l’intérêt en commun de la rupture conventionnelle et négociez la date de départ.
Ce n’est qu’à l’issue de la négociation que vous passerez à la rédaction de la convention. Ce document doit contenir les points de la liste suivante :
- Les indemnités que touchera l’employé ;
- La date à laquelle le contrat de travail est rompu ;
- La date de la rédaction de la convention ;
- Les signatures de l’employé et de l’employeur.
Qu’est-ce que la prise d’acte ?
Par définition, la prise d’acte est un mode de rupture de contrat de travail généralement utilisé lorsque le salarié considère que son employeur a manqué à ses obligations contractuelles. Il s’agit par exemple d’une discrimination, d’un non-paiement des salaires ou d’un harcèlement.
Cette action se traduit par une formulation de ses griefs contre l’employeur, puis une saisine du Conseil des prud’hommes. Si les juges prud’homaux légitiment la prise d’acte de la rupture du contrat, l’employeur est tenu de verser les obligations de la liste suivante à l’employé :
- L’indemnité de licenciement ;
- L’indemnité de préavis ;
- L’indemnité de congés payés ;
- Des dommages-intérêts pour licenciement abusif.
Les motifs d’absence légitime : que sont-ils ?
Une absence injustifiée ne constitue pas nécessairement un abandon de poste, car les absences non planifiées ne sont pas systématiquement considérées comme des fautes graves.
Afin d’éviter un licenciement abusif, l’employeur doit faire preuve de prudence dans l’interprétation de certaines situations. Voici une liste d’exemples des cas qui ne correspondent pas à un abandon de poste :
- Le fait de quitter précipitamment le lieu de travail pour des raisons de santé ou de sécurité. Le cas échéant, l’employé exerce son droit de retrait ;
- Le départ précipité du salarié pour se rendre au chevet d’un parent mourant ;
- L’absence injustifiée de l’employé pendant une semaine alors qu’il a eu une attitude irréprochable pendant 30 ans.
- Arrêt maladie ;
- Congés payés ou RTT (accordés par la direction) ;
- Congé légal (pour participer à un évènement familial) ;
- Autres types de congés autorisés par l’employeur (assistance à un enfant malade, congé sabbatique, congé sans solde, congé pour transition professionnelle…).
Le non-retour du salarié sur le lieu de travail après expiration de son arrêt maladie prolongé alors que l’employeur ne l’a pas convoqué à une visite médicale de reprise est également un motif d’absence légitime.
Cette infographie reprend les grandes lignes concernant les motifs d’absence légitime :
sérieuse, et ouvrira droit à des dommages et intérêts.
L’employé a le droit de saisir le Conseil des prud’hommes s’il estime disposer des éléments nécessaires prouvant la légitimité du motif de son absence. S’il statue en sa faveur, le juge peut condamner l’employeur à verser au salarié des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les salaires et les congés payés correspondant à la période de suspension du contrat de travail. Même si le salarié a été licencié pour faute grave, il touchera les indemnités de licenciement et de préavis.
Que faire en cas d’abandon de poste de son employé ?
Face à un abandon de poste, l’employeur doit suivre une procédure stricte. Voici la liste des étapes à suivre :
- Rassembler des preuves de l’abandon de poste
Lorsque le salarié ne se présente plus à son poste de travail, de manière répétée et sans motif légitime, l’employeur a le choix entre les alternatives de la liste suivante :
1- Essayer de reprendre contact avec l’employé pour lui demander de se justifier
L’employeur peut contacter le salarié par tous les moyens (appel, mailing…) pour connaître les raisons de son absence. Durable et facilement vérifiable, une preuve écrite a une force probante plus importante. L’employeur peut également mener une enquête auprès des autres collaborateurs, tenter d’en savoir plus sur un éventuel arrêt maladie du salarié l’empêchant de prendre contact, etc.
2- Mettre en demeure le salarié afin qu’il reprenne sa fonction
Sous forme de lettre recommandée avec accusé de réception, la mise en demeure envoyée par l’employeur doit constater la date du début de l’absence du salarié. Elle doit aussi présenter le choix qui s’offre à ce dernier : soit de fournir un motif valable d’absence, soit de reprendre son poste avant une date souhaitée.
Voici une infographie qui présente les alternatives de l’employeur face à l’abandon de poste :
- Enclencher une procédure disciplinaire
L’absence non motivée et non autorisée du salarié justifie les sanctions de la liste suivante :
- Soit une sanction disciplinaire(avertissement, mise à pied…) ;
- Soit un renvoi pour cause réelle et sérieuse, ce qui ouvre droit à l’indemnité de licenciement ;
- Soit un licenciement pour faute grave, ce qui prive le salarié de son indemnité de licenciement.
En cas d’abandon de poste, le licenciement pour faute grave peut être justifié par la mise en garde de l’employeur contre un départ prématuré par exemple.
En revanche, le licenciement pour abandon de poste ne sera pas justifié si le motif figure parmi ceux de la liste suivante :
- Le décès d’un proche ;
- La consultation médicale justifiée par l’état de santé du salarié ;
- L’exercice de son droit de retrait.
La vidéo de maître KATIA OUDDIZ-NAKACHE vous explique les conséquences et les risques de l’abandon de poste.
Quelle est la procédure en cas de licenciement pour abandon de poste ?
Le licenciement pour abandon de poste doit respecter un certain formalisme, que la faute soit simple ou grave. Voici la liste des étapes à respecter :
Étape 1 : la mise en demeure du salarié
Si le salarié refuse délibérément de répondre à l’employeur ou s’il reste injoignable, l’employeur doit envoyer une lettre de mise en demeure sous forme de lettre recommandée avec accusé de réception. Comme objet, la lettre ordonnera soit le retour du salarié au sein de l’entreprise, soit la justification de son absence. À défaut de réponse, l’employeur pourra démarrer une procédure de licenciement pour faute grave.
Étape 2 : la convocation du salarié à un entretien préalable
Envoyée sous forme de lettre recommandée avec accusé de réception ou donnée en main propre si possible, la convocation à un entretien préalable au licenciement doit être remise au salarié deux mois à partir du moment où l’employeur a connaissance des faits fautifs.
Étape 3 : l’entretien au licenciement
L’entretien préalable à l’éventuel licenciement doit avoir lieu au plus tard cinq jours ouvrables après la réception de la convocation par l’employé. Au cours de cet entretien, ce dernier peut se faire assister. Quant à l’employeur, il doit préciser les motifs du renvoi envisagé et recueillir les explications du salarié sur son comportement. L’employeur peut poursuivre la procédure de licenciement si le collaborateur ne se présente pas à l’entretien préalable.
Étape 4 : la notification de licenciement
Deux jours de réflexion s’imposent à l’employeur avant de prendre sa décision. S’il décide de poursuivre la procédure de licenciement pour abandon de poste, il doit informer le salarié de sa décision en lui envoyant une lettre recommandée avec accusé de réception. Cette notification doit être envoyée au plus tard un mois après l’entretien.
Que faire si l’employeur ne réagit pas à un abandon de poste ?
Si votre employeur ne réagit pas face à vos absences, vous avez le choix entre les options de la liste suivante :
- Patientez encore quelques jours ;
- Revenez travailler, partiellement ou totalement ;
- Tournez-vous vers un avocat spécialisé en droit du travail pour connaître la procédure idéale pour rompre votre contrat de travail.
L’employeur peut-il suspendre le paiement du salaire ?
Si l’employeur cesse le paiement des salaires de l’employé ayant fait un abandon de poste sans avoir enclenché une procédure de licenciement, il s’expose à quelques risques. En voici la liste :
- Le salarié peut saisir le Conseil des prud’hommes pour prise d’acte de la rupture du contrat de travail. Le cas échéant, il doit formaliser au préalable sa décision en envoyant un courrier à l’employeur, ce qui entraînera immédiatement la cessation du contrat de travail.
- Le salarié peut également demander au juge prud’homal une résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison des fautes de l’employeur. Dans ce cas, le contrat de travail n’est pas encore rompu. Seul le juge peut le prononcer.
Cette infographie résume les conséquence du licenciement pour abandon de poste :
L’employé peut ensuite demander au juge de requalifier la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse. Si les preuves apportées sont fondées, le juge ordonne à l’employeur de verser au salarié les indemnités de préavis, de congés payés et de licenciement ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Comment un avocat peut-il intervenir en cas d’abandon de poste ?
Un avocat spécialisé en droit du travail peut apporter une aide précieuse pour résoudre les conflits liés à un abandon de poste, que ce soit du côté de l’employeur ou du salarié. Voici comment il peut intervenir :
Côté employeur :
- Conseils : Un avocat peut guider l’employeur sur les démarches à suivre pour traiter un abandon de poste conformément à la loi, y compris l’envoi de la mise en demeure.
- Rédaction : Il peut rédiger la lettre de mise en demeure et d’autres notifications nécessaires pour formaliser la situation et s’assurer que tous les documents respectent les exigences légales.
- Représentation : Si le salarié conteste la décision de l’employeur, l’avocat peut représenter l’employeur devant les Prud’hommes pour défendre ses intérêts.
- Négociation : L’avocat peut aider à négocier un accord amiable avec le salarié, comme une rupture conventionnelle, pour éviter des conflits prolongés.
Côté salarié :
- Évaluation : Un avocat peut analyser les circonstances de l’abandon de poste pour conseiller le salarié sur les conséquences possibles et les justifications légales.
- Conseils : Il fournit des conseils sur les droits du salarié en cas d’abandon de poste, y compris les indemnités potentielles et les risques juridiques.
- Négociation : L’avocat peut négocier avec l’employeur pour tenter de résoudre le conflit à l’amiable, par exemple en trouvant un arrangement ou en négociant une rupture conventionnelle.
- Représentation : Si le litige se poursuit, l’avocat peut représenter le salarié devant les Prud’hommes pour défendre ses droits et contester les décisions de l’employeur.
Pour conclure, une absence prolongée n’aboutit pas forcément à un abandon de poste. Le salarié peut justifier son action en fonction des motifs. De son côté, l’employeur peut licencier ou non l’employé, notamment si son absence n’a pas provoqué une désorganisation de l’activité de l’entreprise. Dans tous les cas, que vous soyez salarié ou employeur, nos avocats spécialisés en droit du travail peuvent vous éclairer davantage en fonction de votre situation.
POINTS CLÉS À RETENIR :
- L’abandon de poste = démission sans justification.
- Pas d’indemnisation France Travail en cas de démission.
- Risque de perte de salaire, indemnité, allocation chômage.
- Impossibilité d’exercer un nouvel emploi immédiatement.
- Négociations privées et convention pour départ.